Des Verts et des pas mûrs
Il existe un point commun entre la blogueuse algérienne que je suis et les supporters de l’équipe nationale. Nous sommes tous les deux verts. A la seule différence qu’ils sont Verts de la tête au pied, tandis que moi, je suis verte de rage.
Pourtant, je me souviens bien d’une adolescente qui était encore loin de se soucier de la dangereuse tournure politique que prenait son pays. Une adolescente qui n’hésitait pas à sortir le maillot de foot vert et blanc et à s’enduire le visage de peinture Made in China au point d’en développer un urticaire sévère.
Si le foot unit les peuples, il peut aussi les désunir. Preuve à l’appui. En 2010, l’équipe algérienne de football se rendait au Caire pour disputer le match contre l’Egypte pour la qualification au Mondial 2012. L’accueil fut des plus chaleureux, les Pharaons n’ayant que très peu d’estime pour les Fennecs. Après caillassage du bus de l’équipe et quelques blessures pour certains joueurs, la guerre fut déclarée. Dans la capitale, on voyait des jeunes défiler avec des boites en cartons déguisées en cercueil et ornées du drapeau égyptien. Du côté égyptien, on entendait parler d’étudiants algériens qui se faisaient agresser car ils étaient algériens, et que le foot passait avant toute idée de tolérance et de vivre-ensemble. Ceux qui se trouvaient le cul entre deux chaises, étaient bien entendu les couples mixtes, dont certains ont choisi de suivre la même lignée que les deux peuples : le divorce.
Comment un sport peut-il avoir une telle incidence sur des comportements inter-relationnels ? Pourrait-on concevoir une guerre entre deux quartiers après un affront violent entre deux joueurs de domino ?
Un vieil Algérois vêtu d’un shangai pourrait me répondre simplement « Benti, les algériens ont le sang chaud ! Et puis, tu es une fille, tu ne peux pas comprendre, le foot c’est tout ce qu’on a ! ».
C’est donc tout ce que l’Algérie possède. Un beau méchoui halal de joueurs pour la plupart importés d’Europe, courant vers le pays de leurs parents (accompagné d’un chèque) comme un âne vers la carotte. Une équipe qui, le temps d’une qualification et de 3 matchs en Coupe du Monde, fera oublier à l’Algérien ses tracas quotidiens.
Rien n’est plus beau que de voir un peuple s’unir le temps d’une soirée au nom du sport !
Rien n’est plus laid que de voir des supporters bafouer des règles primaires du fair-play et du football qu’ils adulent tant, en huant l’hymne du pays adverse, en jetant une bouteille de yaourt contre un arbitre ou en envahissant un stade au risque de faire sanctionner leur propre équipe.
Je sens qu’après cet article, certains m’attendront de (coup de) pied ferme à Alger !
*shangai: également appelée « bleu de chine » , il s’agit d’une tenue portée par beaucoup d’Algériens , sorte de chemise en jean à col Mao.
*benti: « ma fille » en arabe
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